Les nouvelles de Matthieu à Calcutta. Histoire de bien commencer, voici une carte du pays. La ville est surtout connue en France pour Mère Thérésa, mais je vais vous raconter des anecdotes plus récentes...

     Ceci est mon premier blog. Je n'ai pas l'habitude d'écrire un journal, aussi je verrai si cet exercice m'amuse. Aujourd'hui je ne suis pas encore parti, je m'occupe de mettre en place le maximum de choses.

Quelle surprise d'apprendre que Kolkata est aussi le "Paris de l'Asie du Sud-est" ! Ville coloniale, ville anglaise, ville indienne, ville commerciale ouverte au monde, Kolkata est une des premières villes cosmopolite du monde, et s'est toujours enrichie du mélange des cultures de ses communautés. La ville est considérée comme la capitale culturelle de l'Inde, et son amour des livres est célèbre. La Foire aux Livres de Kolkata est la plus grande du pays, et accueille des milliers de visiteurs. Malheureusement, c'est aussi l'occasion d'une grande pollution, et je suis surtout frappé par le nuage de poussière qu'il y a à l'intérieur. C'est irrespirable, il faut sortir au plus vite. Les gens ont un mouchoir devant la bouche.
Le soir, la Puja se termine avec l'offrande au Gange, le Fleuve de Vie. En Inde beaucoup de choses se terminent dans le fleuve. Les idoles sont jetées sous les cris de la foule (elles seront récupérées par les services municipaux plus tard dans la nuit car bon c'est polluant tout ça).

Les trottoirs indiens sont plus "vivants" que les nôtres. D'abord, ils sont plus aléatoires. Inexistants ou défoncés, recouverts par la végétation ou recouvert de détritus, il y a toujours quelque chose dessus. Les indiens préfèrent marcher sur la route en général (enfin pas au centre ville). On y trouve tous les services: petites boutiques, nourriture, et même coiffeurs. On y voit des taudis aussi, des immigrés bengalis pour la plupart, qui vivent dans la rue.

Les hommes portent préférentiellement une tenue occidentale. Sandale-pantalon-chemise est un classique, avec plutôt jean-T-shirt pour les jeunes. La propreté est variable selon le niveau social. Plus original, il est courant de voir des hommes en "robe". Ce sont en général des personnes pauvres qui je pense n'ont pas les moyens d'avoir un pantalon. On m'a dit aussi que c'était souvent des musulmans plutôt. Ce n'est jamais une tenue "belle" comme pour les femmes, on sent que c'est très utilitaire. La robe est un habit normal au même niveau que le pantalon.

Il y a également des différences dans les rapports sociaux d'un point de vue physique. Entre les hommes et les femmes, on se "touche" moins, on voit peu les couples se tenir par la main (mais plus dans les grandes villes). Quand à la bise pour les femmes... D'un autre côté, je suis surpris des rapports entre mêmes sexes. Les femmes se tiennent par la main, comme on peut voir en France. Mais c'est aussi le cas des hommes. On voit souvent des jeunes se tenir par la main, ou marcher enlacés dans la rue. C'est valable aussi entre un père et son fils, et se retrouve aussi entre deux travailleurs.  

Voici un exemple de repas classique tel que je le prends depuis des semaines. C'est un repas Bengali plus précisément. L'élément de base est le riz bien sûr, que l'on mixe avec différents items: les végétariens  verts (épinard, haricots) et jaunes (patate, brocolis, carotte), et un dal, une soupe qui permet de faire un liant, que je préfère non épicée. L'eau vient en bouteille. Selon les goûts on fait des petits tas ou on mélange tout allègrement.

L'autre élément de base est le fameux pain indien, qui ressemble à une petite crêpe chez nous. Le roti est une version basique qui sert d'aide pour prendre la nourriture ; le naan (photo au centre) est un disque plus épais et le puri (terme hindi, en bengali: luchi) est la version "dessert" bien huileuse et tendre (petits disques en haut sur la photo). On peut voir ici aussi à gauche une salade de légumes frais mixed raita comme on peut en avoir chez nous, mais avec des épices en plus ! Dans l'assiette de droite, la "boule" blanche est un concassé de riz: c'est la nourriture de base des indiens du Sud, appelée idli. 

Cette nuit j'ai eu du mal à dormir. La température que j'indique à gauche n'est pas celle de la journée, mais celle de ma chambre à 00h ! Depuis quelques semaines déjà les domestiques dorment avec les ventilateurs en marche, comme mes collègues de bureau. Mais j'ai du mal à m'y habituer, on croirait dormir avec la machine à laver en route, et puis je préfère attendre mon retour en Mars. Ceci dit, je n'aurai sans doute plus le choix bientôt. 
Par ailleurs pour donner une note d'optimisme, Têtu a donné une bonne conclusion à l'affaire du Belge...

Au bas de l'immeuble on trouve les vendeurs de nourriture ambulants (cf. Jan 24). On peut voir ici les en-cas vendus: biscuits dans les pots en verre, raffraîcheurs de bouche en sachets, cigarettes. D'ailleurs on vend les cigarettes à l'unité ici, cela évite de fumer trop. Au premier plan, vous pouvez voir des petits "pots" en terre cuite. C'est l'équivalent écologique des verres en plastiques. Après usage, c'est par terre. Bon je suis pas sûr que ce soit mieux mais au moins c'est biodégradable.

Comme je l'avais dit au début, les domestiques dorment à même le sol (cf. Jan 21). Ils n'ont pas de chambre, et doivent attendre qu'une des 3 chambres soit vide si ils veulent faire leurs besoins. Pour manger ils sont accroupis par terre. Dans une société aussi hiérarchisée, les rapports entre "supérieurs" et "inférieurs" n'ont pas le même niveau qu'en Europe, et les domestiques sont mieux lotis que ceux dans la rue, avec ce travail qui laisse temps libre et télévision et permet de manger tous les jours.

Bappaditya et Praloy m'emmènent à la Cité de la Science, toute aussi poussiéreuse que la Villette chez nous. Ici les panneaux raffraichis portent sur le programme spacial brûlant d'actualité en Inde: le pays a lancé en octobre 2008 son premier satellite pour cartographier la lune et a promis d'y atterrir pour 2013! Entre la Chine et ses missiles et l'Inde et ses satellites, les puissances asiatiques nous rejoue la Guerre des étoiles des années 60 ! 

L'homosexualité est taboue en Inde. Mais comme dans de nombreux pays du monde, le HIV/SIDA pose des gros problèmes de santé publique, et force les gouvernements à s'adresser aux populations à risques, parmi lesquels sont les homosexuels (avec les usagers de drogues ou les migrants). La campagne organisée par l'Etat du Bengale Occidental met en scènes des poupées et doit vraisemblablement s'adresser à une population masculine jeune et décomplexée.
Sur la forme, on peut s'interroger sur le choix de poupées: est-ce pour adoucir une réalité que l'on trouve trop dure: l'existence de minorités sexuelles? Le côté ludique pour éviter des photos trop réalistes?
Sur le fond, c'est encore plus déroutant. Les slogans appellent le public visé à la fidélité ou la responsabilité. Comme moyen contraceptif cela se rapproche plus des appels du Vatican que des messages plus explicites français. La campagne fait appel au sens moral des personnes, alors que la société les condamne globalement pour immoralité. Que faut-il comprendre ?
Le dernier panneau enfin est désarmant de naïveté: on invite les personnes à avoir autant d'enthousiasme à se renseigner sur le HIV que de suivre leur match de foot préféré. Avant même de penser à se protéger ou de soutenir les personnes, le gouvernement invite à s'informer. Pour faire tomber les tabous, les idées reçues, les peurs. Ce message semble s'adresser à tous cette fois. Le soutien du football club de Police de Kolkata est curieux dans un pays où la police arrête les homosexuels.

Le Bengale Occidental est célèbre en Inde pour ses desserts, aussi les français ont de quoi se réjouir. Un peu moins quand il s'agit d'en manger malheureusement. Les desserts bengali sont saturés de sucres à l'excès, voire imbibés de sirop de sucre. Ici vous pouvez voir rossogolla (boules blanches), fromage et sirop, et des gulab jamun (version marron car frite). La "confiture" est chatni, fait de dattes, sirop, tomates and gingembre.  est un mélange de tomates au gingembre, assez horrible selon moi.

Les maisons indiennes sont en général baptisées. Celle de Bappaditya s'appelle Balaka, qui est une sorte de nuage. Sur la boîte aux lettres, il y a tous les membres de la famille, le père en premier. C'est nécessaire avec les familles élargies. J'ai été surpris d'apprendre que leur maison n'avait que 2 ans, alors qu'elle paraît si rouillée. La faute au climat chaud et très humide, qui "vieillit" tout prématurément.